Chemin de St-Jacques en Auvergne - Entre Brioude et Murat du 8 au 15 septembre 2007

 

   
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Les trois premiers jours de la marche d'automne 2007 décrits par Marion Niedermann

Cette année nous avons participé à la marche d'automne, organisée par Alda Borgeat et Bernhard Büchler, en Auvergne entre Brioude et Murat. C'est la deuxième fois que nous marchons sur ce chemin jacquaire de Clermont-Ferrand à Cahors. Cette année encore, Bernhard nous avait envoyé un descriptif de la marche avec des illustrations et des indications des différents dénivelés. Le prix de cette semaine est étonnamment bon marché.
Nous avions rendez-vous le 8 septembre à 10 heures à la gare de Genève. Les participants venaient de la Suisse alémanique, du Valais, du Tessin et de la Suisse romande. Nous étions 23 personnes, dont 4 couples, 8 femmes et 7 hommes. Nous en connaissions certains et ce fut pour nous un plaisir de les retrouver. Durant le long voyage jusqu'à Brioude, en passant par Lyon et Clermont-Ferrand, nous avons eu la possibilité de faire connaissance avec les nouveaux participants. J'ai pu, en particulier découvrir et apprécier l'humour du prêtre Ludwig. A Brioude, nous avons retrouvé le magnifique hôtel où nous avions passé notre avant-dernière nuit l'an passé.
Le lendemain matin, dimanche, nous avons assisté à une messe avec communion célébrée par Ludwig, avec une bénédiction, ceci pour donner un sens à notre cheminement.

 



Evelyne Bigot, notre adorable accompagnatrice, chargée de transporter nos bagages d'une étape à l'autre et qui nous a préparé chaque jour de magnifiques pique-niques était là pour charges nos affaires dans le bus. Au cours du déjeuner, Edwin et moi faisons la connaissance d'Hélène et je suis impressionnée par son optimisme. A 10 heures, nous nous réunissons, c'est notre premier jour de marche, nous avons à cheminer sur 19 km jusqu'à Lanau avec un dénivelé de 200 mètres. Chacun du groupe doit repérer la personne dont il sera responsable tout au long de la marche.

Nous nous trouvons dans le département de la Haute-Loire. Dans les années 500 av. J.-C. jusqu'à 1'000 ap. J.-C., dans cette région fut cultivé le vin et coupé le bois et envoyés par bateau à Paris. On y trouve aussi le plus ancien passage routier de la rivière, bien avant l'ère chrétienne, entre l'Auvergne du sud et les villes du Midi languedocien.

Bientôt, nous traversons un petit ruisseau qui, en cas de pluie peut se transformer en un véritable fleuve. Les serviettes, emportées avec nous n'ont pas été utilisées. Nous marchons, en bavardant et avec courage à travers les vignes, les champs de maïs et de tournesols dont les fleurs mûres et trop lourdes se laissent tomber. Le soleil brille et la température est un peu fraîche, c'est un vrai plaisir. Après un petit arrêt, nous arrivons à Bournoncle, petit village, où nous découvrons un ancien four banal encore en service, nous en retrouverons d'autres, anciens ou rénovés tout au long de notre parcours. A Laroche, celui-ci date du 12ème siècle. Nous admirons, en passant, les ruines d'un ancien château bâti sur une éminence rocheuse.


 

Tout au long du chemin, nous sommes salués par les aboiements plus ou moins affectueux des chiens. A midi, nous rejoignons St-Géron, là, nous pique-niquons. Monique nous avertit qu'il faut passer silencieusement devant la chapelle, la porte est ouverte et une cérémonie est en cours. Lorsque nous arrivons près de l'église, nous jetons un coup d'œil à l'intérieur et le prêtre qui baptise nous invite à participer à la cérémonie, il avait remarqué la coquille sur le chapeau de Rita et a deviné que nous sommes un groupe de pèlerins. Nous sommes touchés par la façon aimable dont il parle aux parents et proches du petit enfant. Nous apprenons que cette église date du XVe siècle et qu'elle contient les reliques de St-Brach.
Pendant le pique-nique, Evelyne distribue des tranches de tartes au jambon et aux olives. A St-Géron, se croisaient les voies commerciales importantes depuis le IVe siècle. A cet endroit on peut encore découvrir des restes de l'ancienne voie romaine.

Nous poursuivons notre chemin et attaquons une courte mais rude montée. Après avoir passé sous l'autoroute, nous rejoignons Farreyrolles, une magnifique région agricole, avec de gigantesques silos qui se dressent sur les hauteurs. Nous nous trouvons sur la " route du lait ", avec un magnifique panorama sur les plaines et les collines.

Nous attaquons le dernier tronçon et atteignons bientôt Léotoing. Avant l'arrivée au village, nous apercevons à travers les arbres, les ruines romantiques du château que possédait le Dauphin d'Auvergne, endroit stratégique pour surveiller et contrôler la vallée de l'Alagnon à nos pieds.

Nous nous réunissons sur la place, devant le village pour écouter le texte que Bernard R. a préparé comme méditation sur le thème choisi pour toute la semaine: "l'accueil". Il nous rappelle, entre autre, les paroles de Jésus : " Ce que vous avez fait aux plus petits d'entre les miens c'est à moi que vous l'avez fait. "

Il fait froid et le vent souffle. Une partie d'entre nous est transportée en bus jusqu'à l'hôtel, tandis que le reste du groupe descend par un sentier escarpé, sur environ un kilomètre dans une forêt de chênes clairsemée jusqu'à Lanau, au bord de l'Alagnon. Nous buvons un verre au restaurant en attendant que les autres arrivent à l'hôtel au Babory. Pendant le repas du soir, nous profitons de faire plus ample connaissance avec les autres participants, l'ambiance est très amicale, Jean-Max nous raconte des histoires et chante. La tarte aux pommes est vraiment délicieuse.

Le deuxième jour, nous repartons de Lanau et marchons jusqu'à Montgon, nous avons 17 kilomètres à faire avec un dénivelé de 200 mètres. Le départ est fixé à 10 heures mais tout le monde est prêt dix minutes avant.

Depuis le pont sur l'Alagnon, nous avons une magnifique vue sur le château de Torsiac avec sa tour. Le chemin est agréable, il suit le cours de la rivière. Sur les talus et en bordure, nous découvrons des tas de plantes intéressantes dont nous ne connaissons pas les noms, heureusement, Antoinette, Irma et Henri nous renseignent. Que c'est agréable d'avoir chaque jour un ou une " serre-file " qui surveille que personne ne se perde.

 

Le chemin commence maintenant à monter et nous nous arrêtons un moment sous les noyers. Ensuite, nous traversons le village vigneron de Brugeilles. Nous apprenons que le clocher de l'église dont les cloches sont apparentes, est un clocher "peigne". Nous traversons le ruisseau " le Bave ". Après une petite montée, nous traversons un pont et observons la voie ferrée, creusée en contre bas. Peu après, nous pouvons admirer, dans le mur de soutènement de la voie de chemin de fer, une quantité de nids de choucas. Bientôt, c'est le moment du pique-nique: un très joli pré, au soleil, près de la rivière Alagnon et à l'ombre des chênes, là, nous retrouvons Evelyne et le bus, elle nous attendait et avait préparé un délicieux assortiment de bonnes choses. C'est vrai qu'en France, on mange comme des rois ! Janine trempe ses pieds dans la rivière, moi je l'imite, un vrai plaisir !
 

 

Aujourd'hui c'est Antoinette qui propose la méditation. Elle nous parle du sermon de Jésus sur la montagne où il dit que le plus grand des commandements est l'amour de Dieu pour les autres et pour soi-même. L'amour divin doit être en nous et rejaillir sur les autres. Elle nous conte une légende hindoue de Shiva et des autres dieux qui cherchent à cacher un trésor que l'homme ne pourra jamais trouver. Hansuredi nous raconte son expérience d'hospitalité lors de son pèlerinage sur le Chemin de St-Jacques.

 

 

Nous nous remettons en marche, le long d'un affluent de l'Alagnon et observons de nouvelles villas avec de beaux jardins. Arrivés à Blesle nous nous accordons du temps pour la visite de ce bourg intéressant. Blesle fut implanté sur un site entièrement remodelé à leurs besoins par les hommes qui l'avaient choisi : les plateaux aux sols rocailleux ont été empierrées, les coteaux occupés après un aménagement en terrasses propices aux cultures de la vigne et des arbres fruitiers. Au cœur de ce paradis, un bourg ignoré des voies de circulation, protégé des assauts du temps et qui doit tout à son abbaye fondée dans les années 880 par une aristocrate auvergnate de haut rang. L'église est malheureusement en rénovation et fermée. Nous admirons les façades extérieures merveilleusement ornementées. Au-dessus des maisons, domine la tour des seigneurs de Mercoeur. Un beau bâtiment du début du XIIIe siècle. Nous nous promenons à travers les petites ruelles avec les vieilles maisons et les petites échoppes. Après avoir bu une verveine ou un café à la terrasse d'un restaurant, nous reprenons le chemin. Nous nous retrouvons à nouveau au Babory où nous avons passé la nuit.

 

Dans la région du Babory on peut observer des orgues basaltiques. En effet, lorsqu'une coulée de basalte, émise entre 900 et 1'100° C, s'épanche, elle se refroidit au contact de l'air et du sol. Les surfaces de contact se disloquent mais, à l'intérieur de la coulée, le passage progressif de l'état plastique à l'état cristallisé, qui produit une diminution de volume, se traduit par l'apparition de fissures verticales et polygonales. Elles débitent la roche en colonnes prismatiques, dont la régularité dépend de la durée du refroidissement.

 
Nous avons maintenant une montée de 200 mètres de dénivelé, il fait chaud et nous transpirons, nous nous encourageons. Arrivés en haut du plateau, nous avons une vue panoramique magnifique. Nous pouvons admirer des collines, des arbres, des haies vives, des vaches, des moutons et de petits villages dans le lointain. Nous arrivons au village de La Penide. Certains d'entre nous prennent le bus, les autres continuent à pied jusqu`à Massiac. Nous sommes dans le Cantal. En deux groupes, Bernard transporte tous les participants jusqu`à Montgon. En passant avec le bus, nous pouvons admirer, sur une paroi rocheuse volcanique la chapelle Ste-Madeleine.
 

 

A Massiac nous avons l'opportunité de visiter l'église St-André et admirons la Vierge de Chalet (XIIIe), trouvée dans la chapelle Ste-Madeleine, qui a toutes les caractéristiques d'une Vierge noire. Nous pouvons y voir en outre, une Vierge ouvrante, forme de statue très rare, ainsi qu'une Madeleine myrophore (porteuse de parfum). L'église est de construction romane. Elle fut plusieurs fois pillée ou incendiée. Après cette visite, un bon souper nous attend ainsi qu'une belle chambre. Nous admirons toujours Alda, comme elle organise la distribution des logements d'une façon remarquable et prévoyante.

 

Le troisième jour fut le plus sportif, la distance entre Massiac et La Chau est de 19 kilomètres, mais avec un dénivelé de 200 mètres le matin et de 480 mètres l'après-midi. Après avoir pris le petit déjeuner, nous partons avant huit heures. Rita voulant mettre des cartes à la boîte aux lettres, veut les glisser dans un guichet automatique d'une banque. Nous longeons à nouveau l'Alagnon pendant environ une heure. Il y a une petite brume, il fait frais. Tout en marchant, j'ai le plaisir d'échanger des propos amicaux avec Huguette et plus tard Rita qui marche toujours en sandales. A La Roche, nous pouvons admirer un autre four banal avec une croix sur le toit. Plusieurs maisons en pierre sont rénovées. A Aurouze, nous nous arrêtons près d'une fontaine dans laquelle nagent des poissons rouges, pour reprendre des forces avant la rude montée aux ruines du château.

 

C'est presque une partie de varappe. Devant moi, Carla courageuse, franchit pierres et corniches et moi, j'avance à quatre pattes. En haut, nous avons une magnifique vue. Là Bernhard, notre guide compétent, nous donne des informations très intéressantes sur le château. Ce lieu est déjà cité dans un texte du IXe siècle. Au XIe siècle, il semble qu'un premier château soit construit sur le site par la famille Rochefort. Au XIVe siècle, Bertrand de Rochefort se livre à des actes de pillage. La justice royale le condamne à mort et fait raser le château. En 1320, un "nouveau" château est construit. Vers 1430, avec l'amélioration des armes et surtout l'invention des premières armes à feu, le château est modifié. A la révolution, ce château d'aspect renaissance fut en partie détruit. Récemment, la municipalité, avec le concours de la Région du Cantal, a décidé de restaurer ces ruines et leur rendre la majesté perdue depuis la Révolution. Une œuvre de très longue haleine.

 

 

Notre marche se poursuit à travers les chênes et les châtaigniers. Dans la descente vers Molompize, au-dessous des saules, Bernhard nous montre des Palhas, champs en terrasses, aménagés dans des pentes raides, où les agriculteurs cultivent des vignes, légumes et arbres fruitiers. Le travail dans ces champs et l'entretien demande beaucoup de travail.

Après la descente, nous rejoignons le village de Molompize où nous attend notre fée Evelyne avec le pique-nique. Un vent frais s'est levé, mais notre Evelyne ingénieuse, a pris contact avec Madame la maire. Elle a réussi à obtenir que nous puissions manger dans la salle polyvalente. Nous acceptons volontiers ce luxe, avec toilettes et de l'eau courante.

 

Nous poursuivons notre marche par une rude montée dans la forêt. Dans une clairière, Adrien nous propose une méditation sur le Jugement dernier et nous raconte l'histoire d'un pèlerin se rendant à Jérusalem et qui le soir arrive dans une petite ville. Accompagné d'un jeune homme, il cherche l'imam, qui ne peut pas lui permettre de dormir dans la mosquée. Pensez-vous, un incroyant dormant dans le lieu de culte ! L'imam lui trouve un abri pour passer la nuit. Peu après, le pèlerin est invité à partager un repas dans la famille de son guide. De retour, il s'endort et au milieu de la nuit, il est réveillé par un bruit, c'est l'imam qui lui pose un plat de gâteaux confectionnés par sa mère. Ceci pour montrer l'hospitalité spontanée de ces gens envers l'étranger.

 

 

Nous continuons en direction de Chalagnac. Un premier groupe embarque dans le bus en direction de Ferrières-St-Mary. Le deuxième groupe marchera jusqu`à une fontaine mérovingienne près de la Chau. Dans le lointain, nous apercevons une vingtaine d'éoliennes et Bernard nous transporte à l'étape avec le bus. Quelques intrépides entreprennent la descente à pied jusqu'à Ferrières. Le temps est beau mais un vent froid souffle. Avant d'arriver, nous passons visiter la chapelle de Notre Dame de Vauclair, construite à la fin du XIIe siècle.

 

 

La Vierge que l'on y vénère depuis des siècles est assise, tenant l'Enfant sur ses genoux. Le contraste entre la finesse du visage de la Mère et la rudesse de celui de l'Enfant témoigne de quelque restauration maladroite. Cette statue remonte au XIIe siècle et peut-être au XIe ! Une légende merveilleuse raconte que les femmes du village trouvèrent leur "bonne Vierge" au milieu des bois.

A Ferrières, nous logeons dans différents endroits. Après un très bon repas, dans une ambiance amicale et chaleureuse, nous avons le plaisir d'écouter Antoinette raconter des contes avec son petit air narquois.

Voilà, j'ai terminé mon résumé et je laisse la parole à Ruedi. Je voudrais souligner le côté professionnel et sympathique de l'équipe qui nous a préparé une belle semaine et les remercier très sincèrement pour tout le dévouement et leur gentillesse. Nous avons passé avec ce groupe une excellente semaine.

Thalwil, le 22.9.2007--- Marion

 

La suite racontée par Ruedi Schnegg

Mercredi 12 septembre Ferrières Saint Mary - Joursac

Après le petit-déjeuner à l'hôtel de Ferrières Saint Mary, par un temps beau, mais froid, nous traversons l'Alagnon sur un pont en pierres au milieu du village et commençons immédiatement notre grimpette de la matinée sur le rebord volcanique de la vallée. Lors d'une descente dans un chemin caillouteux, Antoinette glisse, tombe et se fait mal au genou et surtout dans le dos, ce qui a pour conséquence qu'elle sera pour la deuxième moitié de notre marche jacquaire forcée de ne plus prendre de risque et de se ménager. Après deux heures de montée à plus de 1000 mètres d'altitude, nous découvrons un magnifique panorama sur le Cézallier, les sommets du Cantal et par-delà la planèze tout au fond sous l'horizon, le Puy Mary nous indique, et nous indiquera pour les jours suivants, la direction à suivre.

 

 

 

Nous apercevons la ruine du château de Mardogne que nous contournerons demain. Encore une heure de marche en queue leu leu, parfois en légère descente, à travers une chênaie sur la pente du Montlouby, et nous débouchons sur une planèze ou nous attend Evelyne en train d'éplucher des carottes, dernière touche à un assortiment de nourriture qui provoque une exclamation de joie de tous. Après la sieste Françoise Gabathuler nous invite à méditer sur " l'accueil, le chemin vers les autres " et nous continuons notre parcours vers Mallet en silence. Les maisons que nous rencontrons en route sont bâties dans un style typiquement auvergnat et fleuri. De très anciennes masures ont été retapées et dégagent une impression d'opulence. Hélas cette fois-ci c'est Françoise Leyvrat qui est victime d'une chute heureusement sans gravité, ce qui fait dire à un plaisantin que ce soir il y aura de la roulade de pèlerin au souper. Arrivé de nouveau au fond de la vallée nous retraversons l'Alagnon au pont de Vernet. Le premier tiers de la troupe est transporté par Bernard à Neussargues à l'hôtel-restaurant " Chez Betty ". Les autres continuent pour la petite, mais assez raide montée jusqu'à Joursac.

 
Eglise Saint-Etienne de Joursac
La première travée de la nef remonterait au XIIe siècle, le reste de la nef, le chœur et la chapelle sud au XIVe siècle, et la grande chapelle dite du château de Mardogne, au XVIe siècle. Lors de la restauration menée au XIXe siècle, les matériaux d'origine sont remployés au maximum. L'édifice se compose d'une nef à deux travées, d'un chœur et d'une abside polygonale. Les chapelles nord et sud forment les bras du transept qui est prolongé par une chapelle seigneuriale abritant le tombeau de Loys de Foix (XVIe siècle). Une inscription sur le sarcophage : LAGEMARESTE (là je m'arrête), m'a beaucoup amusé. Nef, chœur et chapelles sont voûtés d'ogives ; la chapelle seigneuriale à nervures en palmier comporte liernes et tiercerons. Au sud du clocher, une tourelle polygonale hors œuvre contient l'escalier à vis. À l'intérieur, un décor médiéval a été reconstitué et le mobilier a partiellement été refait en style néo-gothique.

 

 

 

Nous tournons autour de l'église avec son clocher peigne à la recherche du cimetière. Le sacristain interpellé nous dit que les révolutionnaires ont bâti leurs maisons avec les pierres du château. Sa maison est chauffée au bois et comporte des murs de 90 cm d'épaisseur. En hiver Joursac à environ 900 m d'altitude reçoit parfois 30 à 40 cm de neige. La plupart des maisons sont des résidences secondaires. La plus ancienne date de Louis XIV.

En descendant vers Neussargues nous nous arrêtons au cimetière pour chercher les tombes de deux pèlerins de Saint-Jacques. Avant la Révolution Française, les tombes étaient creusées aussi près que possible du mur des églises parce que l'eau pluviale tombant du toit de l'église sur les tombes était réputée bénite. Napoléon Bonaparte désirait créer des cimetières en dehors des villages.
 

Pour arriver à cette fin, il accordait aux familles des concessions à perpétuité ce qui a pour conséquence que les cimetières actuels hébergent des tombes non réclamées par les familles. Ce qui est le cas des deux tombes que nous trouvons avec des panneaux de la Mairie recherchant la famille. Les deux pierres tombales sculptées montrent les attributs du pèlerin : bourdon, coquille et besace ; mais aucune inscription ni date.

Neussargues est une localité assez récente qui, favorisée par l'implantation d'un important nœud ferroviaire, dépasse maintenant l'ancienne ville de Moissac. Nous profitons de l'arrivée avancée pour faire quelques achats et écrire des cartes postales ou simplement boire l'apéro sur la terrasse ensoleillée en compagnie des amis du chemin.
 
Jeudi 13 septembre Joursac - Chalinargues
 

Après le déjeuner, en trois convois, toute la troupe se retrouve pour la méditation conduite par Jean-Max " Accueillir, c'est écouter " à l'église de Joursac. Au départ de la marche, Irma se propose pour la place de serre-file pour remplacer Jacques. Le serre-file a pour mission de rester en permanence à la fin de la troupe pour empêcher ceux qui étaient sortis pour un besoin pressant de ne pas repartir dans le mauvais sens. En passant devant le cimetière, ceux d'entre nous qui n'avaient pas pu le visiter hier, regardent les tombes de nos lointains précurseurs. Ensuite nous montons tranquillement vers les ruines du château de Mardogne.

 

 
Les ruines du château des seigneurs de Mardogne.
Ce nom indiquerait l'antique présence d'un temple dédié à Mars et à Diane. Du château érigé aux XIIe et XIIIe siècles ne subsiste que quelques ruines, suite à l'incendie de 1720 et à la réutilisation des matériaux par les habitants. Ces ruines consistent en un donjon avec quatre murs principaux au milieu desquels étaient une cour et une grande tour carrée avec deux voûtes intactes superposées l'une à l'autre. Chaque étage comprend une pièce. Une citerne cimentée avec de la chaux et de la tuile pilée se trouvait dans la cour du château. Le grand mur d'enceinte subsiste en partie, avec son chemin de ronde. Contrairement à ce qui existe dans les tours-donjons de la région, la tour de Mardogne a sa porte d'entrée au rez-de-chaussée et non au niveau de l'étage.
 

Depuis le château, nous marchons sur le Plateau de Recoules avec une magnifique vue panoramique sur le massif central. Le deuxième clédar à traverser donne à rire à la troupe, parce que le chef le traverse en grimpant par-dessus et les suivants apercevront immédiatement deux mètres plus loin le fil de fer barbelé interrompu pour le contourner. Quelques centaines de mètres plus loin c'est le tour de Carla de faire une chute, heureusement sans gravité. Après une courte descente, nous traversons une nouvelle fois l'Alagnon et montons à la viguerie de Moissac. Après avoir admiré le four banal, nous entrons dans l'église pour voir une pierre tombale érigée sous une statue de Saint-Jacques, ornée d'une grande croix, d'une coquille, d'une besace et d'un bourdon. Elle serait attribuée à un certain Jean Rolland dit Meimaroue, pèlerin de son état, un acte de décès de l'an 1698 attestant ce fait. De l'autre côté de la voie du chemin de fer Evelyne et Bernard nous attendent avec le pique-nique, que nous apprécions à sa juste valeur et profitons ensuite dans cette bienfaisante chaleur d'un soleil ardent pour faire un petit somme.

 

 

 

Une heure de marche plus tard nous contemplons la Croix de Mons. C'est une croix " en raquette " montrant d'un côté le Christ et de l'autre la Vierge datant du XVe siècle. On dénombre environ 3000 croix de chemin au Cantal, les recenser serait fort difficile en raison de leur dispersion. Ce patrimoine très intéressant mérite d'être entretenu et mis en valeur pour ne pas risquer de disparaître. Toutes ces croix ont une signification bien précise qui souvent se rapporte à des légendes et croyances populaires. On peut les classer en plusieurs catégories : croix de chemin, de menhirs, de limites, de villages, de cimetières, de ponts, de sommets, de maisons, de sources, de fontaines… On distingue les croix grecques et les croix latines sur lesquelles on retrouve le Christ, la Vierge et les saints auxquels s'ajoutent des symboles comme des petites croix, des cœurs, des couronnes, le soleil, la lune, un cadran solaire, la coquille et le bâton du pèlerin, un agneau, la fleur de lis, des têtes, des étoiles… La croix de Mons " en raquette ", datée du XVe siècle, porte d'un côté la Vierge entourée d'anges, de personnages agenouillés et de saints et de l'autre le Christ au centre de dix personnages.
 
Avant de quitter ce lieu nous profitons pour prendre des photos du groupe. Une autre croix, dite " de chemin ", marque le début d'un chemin creux, menant à Chalinargues, ce qui pourrait faire croire que ce chemin existe depuis le temps des Mérovingiens. Nous trouvons refuge dans ce village dans un gîte d'étape et de séjour municipal très moderne.
 
 
Chalinargues
Depuis longtemps Chalinargues était connu pour ses foires. Elles approvisionnaient autrefois en grains les marchés d'Allanche et exportaient une multitude de brebis. Son château, actuellement détruit, devient un fief de l'abbaye d'Aurillac, et son église, bien que touchant plusieurs époques, porte le cachet roman. En 1580, les huguenots la saccagèrent et tentèrent en vain de l'incendier.

En fin d'après-midi, nous visitons le petit éco-musée " la Pinatelle ", centre de découverte de la nature et des paysages, à Chalinargues. Le soir, à l'heure de l'apéro, sur la terrasse du restaurant, Antoinette nous raconte deux histoires, l'une, d'un malheureux pourchassé par la mauvaise fortune mais tellement imbécile qu'il finit par se faire manger par le lion. L'autre anecdote fait allusion à Irma, qui avait oublié un objet la veille dans sa chambre d'hôtel. Il y aura encore l'histoire du pèlerin-vigneron qui avait laissé sa vigne à ses cousins et, revenu dix ans plus tard, toujours aussi grand et maigre, mais sans son épouse, tuée par les sarrasins, réussit à se jouer de ses mauvais cousins avec ses airs de violon.
 

Vendredi 14 septembre Chalinargues - Murat

Diane de bonne heure ce jour pour ne pas louper le train à Murat. Janine garde le troupeau de pèlerins comme serre-file. Nous partons avec un splendide lever de soleil dans le dos, que notre photographe Hansruedi essaie sans succès de saisir dans son appareil, soleil qui tente de supprimer les traînées de brouillard dans les dépressions. Nous traversons la Pinatelle, c'est-à-dire un massif forestier sur un vaste plateau volcanique recouvert d'une bonne couche de basalte. Après Peschaud et Mocher, nous apercevons le château de Chavagnac.

Chavagnac
Chavagnac est un château de style directoire avec un corps de ferme du XVIIIe siècle surplombant onze hectares de terres composées de vignes, de prés (avec des chevaux en été), d'arbres fruitiers et de bois. Le châtelain actuel loue des chambres d'hôte et fait profiter ses clients de sa piscine dans le parc.

 
Nous montons dans le bois de Chavagnac à travers pins, genévriers et myrtilles. Après deux heures et demie de marche, nous débouchons sur une région de tourbières à 1240 mètres d'altitude, le point le plus élevé de toute notre semaine et toujours le Puy Mary en point de mire. À nos pieds, un lac étang nous invite à faire un " arrêt glouglou ". Adrien profite pour nous parler des hospitaliers de Belorado, en fait encore un thème sur l'accueil, que nous avons poursuivi tout au long de la semaine pour nos méditations. Carla assume la traduction simultanée en allemand.
À partir de maintenant, c'est la descente, d'abord sur Chastel sur Murat où nous savourons la quiche et la saucisse du pays pour notre dernier pique-nique. Le lieu est situé directement sous la chapelle Saint-Antoine, que nous avons aperçue depuis un moment déjà trônant sur son pic rocheux. Les dames fribourgeoises se décident enfin et nous chantent " le vieux chalet " et autres joyeux airs. Elles sont vivement encouragées de commencer à chanter l'année prochaine dès le premier jour.
 

Chastel sur Murat
La chapelle romane dédiée à Saint-Antoine (XIIe et XVIe siècles) est juchée sur un ancien oppidum. C'est le seul vestige du château de Lesbros.

La dernière descente nous mène à travers un éboulis de lave à Murat où notre marche s'achève. Les trois rochers, des cheminées volcaniques, qui font l'originalité du site de Murat ont pour nom Bonnevie, coiffé par une statue blanche de la Vierge surplombant la ville de ses 140 mètres, Bredons et Chastel. Chacun était pourvu d'un château fort, aujourd'hui entièrement disparu.
 
Murat
Murat est une des villes du département dont l'origine se perd dans la nuit des temps. Son nom celtique signifierait " roc escarpé ", il apparaît pour la première fois dans l'histoire en l'an 270 lors de l'évangélisation de l'Auvergne. La ville est une place fortifiée et son château existe longtemps avant l'an 1000.
À partir du XIe siècle, son expansion est liée à la construction du prieuré de Bredons (vers 1500) par les moines bénédictins venus de Moissac. La tutelle religieuse de Bredons sur Murat se maintiendra jusqu'à la Révolution française.

Au Moyen Age, la vicomté de Murat est l'une des seigneuries les plus puissantes de la Haute Auvergne. Son château fortifié constitue un bastion quasiment imprenable : il occupe le sommet du rocher de Bonnevie. Symbole d'un pouvoir menaçant pour l'autorité royale, il est détruit en 1633 sur ordre de Richelieu.

La guerre de Cent ans a sévi dans la région : la cité de Murat fut livrée au pillage. La fin du Moyen Age apporta à la cité une longue suite de calamités : la peste ravagea la ville qui fut peu après le théâtre d'une sanglante guerre de familles entre Renaud de Murat et Pons de Cardaillac, tous deux prétendants à la vicomté.

 
La dernière guerre a marqué tragiquement la vie de la cité muratoise. La région abrite de nombreux maquisards et résistants. Le 12 juin 1944, sur dénonciation, des soldats allemands et des miliciens commandés par le capitaine Geissler, chef de la gestapo de la zone sud, investissent Murat afin de procéder à l'arrestation de plusieurs de leurs chefs. Un groupe de maquisards venant de Saint Genès, avertis de la présence d'Allemands à Murat, font feu des hauteurs de la ville en direction de la place du Balat. Ils tuent plusieurs miliciens et soldats allemands dont le capitaine Geissler. Le 24 juin, les troupes allemandes reviennent en force à Murat et arrêtent, en représailles, tous les hommes se trouvant en ville : 120 hommes sont regroupés et emmenés vers Clermont-Ferrand pour être déportés dans les camps de concentration (Neuengamme pour la plupart). Voyage sans retour pour 80 d'entre eux.
 
Notre-Dame-des-Oliviers
Fondée en 1357, la collégiale de Murat était dédiée à Notre-Dame-des-Oliviers. Elle abritait une statue de Notre Dame rapportée probablement de Terre Sainte par Saint Louis (mais les spécialistes prétendent qu'il s'agit d'un travail français du XVe siècle) et qui échappa miraculeusement à un incendie en 1493, mais fut dérobée dans les années 1990.

Le sanctuaire, petit au début, s'est agrandi au cours des siècles pour devenir église paroissiale en 1782. A Murat, de tous temps, on invoque Notre-Dame-des-Oliviers pour les personnes consacrées, les malades, les futures mamans et pour demander protection dans les orages. La Vierge Noire a été couronnée en 1878. A cette occasion, la statue monumentale de Notre Dame de la Haute Auvergne a été érigée sur le rocher de Bonnevie qui domine la ville de 140 mètres. Dans son attitude, la Vierge semble présenter la ville à l'Enfant Jésus. La fête de Notre Dame des Oliviers est célébrée tous les ans le dimanche qui suit le 15 août.

 
Après une courte pause-café, nous récupérons nos bagages amenés par Evelyne et montons dans le train vers 14 heures pour un court trajet de 12 minutes. Nous changeons de train à Neussargues et repartons dans un autre convoi, sans avoir au préalable embrassé et remercié Evelyne, qui repart avec le minibus vers le Puy-en-Velay. Nous arrivons à Clermont-Ferrand pour retrouver notre vieil hôtel " Albert Elisabeth " et partager un dernier repas " Aux Commerçants ".
 
Samedi 15 septembre 2007 Clermont-Ferrand - Genève en train

Sans surprise nous arrivons à Genève au début de l'après-midi, assez tôt pour que nos amis suisses alémaniques puissent regagner leurs pénates à une heure convenable.

Ruedi

Récits : du 8 au 11 septembre de Marion Niedermann
du 12 au 15 septembre de Ruedi Schnegg

Photos : Hansruedi Heer

Aquarelles : Bernhard Büchler

Traduction : Carla Luchessa

 
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